Jamais, au cours de ces dernières années, la France n’avait recensé autant de clients bancaires en difficulté financière. Selon le rapport annuel de l’Observatoire de l’inclusion bancaire (OIB), publié jeudi 17 juin, plus de 3,8 millions de personnes ont été identifiées comme « fragiles » par leurs banques à la fin de 2020, un chiffre en augmentation de 12 %. Au cours de l’année dernière, le nombre de « nouvelles détections » de ces situations de fragilité temporaires, en raison notamment d’incidents répétés sur le compte, a progressé de 28 %.
Si la crise économique liée à la pandémie de Covid-19 peut expliquer cette évolution, le rapport de l’OIB met en avant les effets d’une nouvelle réglementation, qui a contraint les banques à mieux identifier les clients en difficulté. Pendant de longues années, les frais d’incidents prélevés aux clients en difficulté financière ont en effet constitué une part importante des revenus des banques. Dans la foulée d’une enquête de l’Union nationale des associations familiales (UNAF) et de 60 Millions de consommateurs, révélant qu’un client en difficulté sur cinq se voyait prélever chaque année par sa banque plus de 500 euros de frais pour incidents de paiement, les pouvoirs publics se sont emparés du sujet.
« Disparités significatives »
Une charte d’inclusion bancaire et de prévention du surendettement, homologuée par un arrêté du 16 septembre 2020, fait désormais obligation à chaque établissement de prévoir un plafonnement des frais, qui « ne sauraient dépasser » 25 euros par mois pour les clients fragiles, et 20 euros par mois et 200 euros par an pour les bénéficiaires de l’« offre spécifique » (regroupant un bouquet de services bancaires essentiels, mais limités, fournis à un prix adapté). Dans son rapport, l’OIB constate que 86 % des banques se sont alignées sur le plafond de 25 euros, quelques-unes seulement ayant opté pour un tarif plus favorable.
Quel a été l’effet de ces mesures sur les frais facturés aux plus fragiles ? L’OIB relève que le montant moyen annuel de leurs frais bancaires n’a que légèrement reculé l’an dernier, à 248 euros, contre 255 euros en 2019. « Ce coût cache des disparités significatives entre les établissements, les montants moyens déclarés s’échelonnant de 140 euros à 469 euros », précise l’OIB.
« Les bénéficiaires de l’“offre spécifique” restent mieux protégés », poursuit le rapport. Pour les quelque 600 000 clients qui en bénéficient, « le coût total de fonctionnement du compte bancaire s’est élevé en moyenne à 120 euros, contre 138 euros en 2019 ». Mais ce dispositif peine à se développer. L’an dernier, les ouvertures d’« offres spécifiques » ont chuté de 17 % par rapport à 2019.